Point de départ de l’action en requalification d’un CDD en CDI

Point de départ de l’action en requalification d’un CDD en CDI
10 juin 2023 EL 0 Comments

Point de départ et prescription de l’action en requalification d’un CDD en CDI : Soc. 15 mars 2023, FS-B, n° 20-21.774

Toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
 
A partir de là, pensez-vous pouvoir déterminer la date à laquelle l’action en requalification d’un CDD en CDI va se prescrire ?
 
La question est loin d’être évidente.
 
Prenons un cas pratique inspiré d’une jurisprudence récente (Soc. 15 mars 2023, FS-B, n° 20-21.774) :
 
Un salarié a été engagé en qualité de vendeur.
 
Il a débuté le 27 juin 2024 et a travaillé quelques heures en juin et juillet 2024 sans contrat écrit. Puis il a conclu, le 10 juillet 2024, un CDD pour la période d’août 2024 au 31 janvier 2025 sans que son contrat ne précise le motif du recours au CDD. Son contrat a ensuite été prorogé jusqu’au 30 juin 2025. 
 
Qu’est-ce que cela vous inspire ? Quand expire selon vous le délai de prescription pour solliciter une requalification du CDD en CDI ?
 
Tout dépend en fait de l’irrégularité juridique reprochée :
 

– Première hypothèse : le salarié invoque l’absence d’établissement d’un contrat écrit sur la période de juin à juillet 2024. 

 
Le CDD doit en effet obligatoirement faire l’objet d’un contrat écrit, ce qui n’a manifestement pas été le cas.
 
Vous devez prendre en compte ensuite que le salarié a 2 ans pour agir, et que cette prescription débute à compter du délai de 2 jours ouvrables imparti à l’employeur pour transmettre au salarié le contrat de travail.
 
Rappelez-vous, il a été engagé le 27 juin 2024.
 
Son délai se prescrit alors le dimanche 30 juin ? 
 
Non, le lundi 1er juillet 2024.
 
En effet, le délai de transmission se décompte en jours ouvrables. Les jours ouvrables sont les jours qui peuvent être légalement travaillés (du lundi au samedi), ils excluent les dimanches et jours fériés. 
 
Or, le 30 juin est un dimanche. Donc on bascule sur le jour ouvrable qui suit, soit le lundi 1er juillet 2024. Cette dernière date constitue donc le terme de la prescription.
 

– Autre motif d’irrégularité, l’absence d’une mention obligatoire au contrat : 

 
L’absence d’indication du motif de recours entraîne automatiquement la requalification du contrat en CDI. 
 
Or, dans notre petit cas pratique, le contrat du 10 juillet 2024 ne mentionnait pas le motif de recours au CDD (salarié absent ou accroissement temporaire de l’activité par exemple).  
 
Le salarié peut alors agir ici à partir de la date de conclusion du contrat litigieux, soit le 10 juillet 2024.
 
Notre salarié peut par conséquent saisir la justice avant le 10 juillet 2026 pour faire valoir ses droits, et pas un jour de plus.
 

– Imaginons enfin que notre salarié reproche à son employeur la succession de CDD.

 
En effet, un CDD ne peut être renouvelé plus de 2 fois dans la même entreprise.
 
Autrement, il est possible d’obtenir la requalification de la relation de travail en CDI.
 
Or, nous avions dans notre cas pratique un enchaînement de 3 CDD. 
 
Pour déterminer le point de départ de la prescription, on prendra le terme du dernier contrat.
 
Rappelez-vous le dernier contrat de notre salarié s’est terminé le 30 juin 2025.
 
Pour saisir les Prud’hommes, le salarié a alors jusqu’au 30 juin 2027.
 

Bilan de l’exercice :

 
La détermination du délai de prescription et son point de départ est loin d’être un exercice évident. Prenez donc conseil. Louper un délai de prescription a des conséquences graves et irrévocables. Au-delà de la prescription, vous ne pouvez tout simplement plus agir et faire valoir vos droits.